-Le design d'ES, premièrement. Je ne mets pas l'adresse pour pas faire de pub mais Nuity le connait.
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Le T-shirt de la fille était violet à la base.

Elle regarda la date avec un sourire narquois. 21 décembre 2012. Aujourd'hui, c'est la fin du monde, pensa-t-elle. Dommage, demain c'est l'anniversaire de mon cochon d'Inde. Il n'aura jamais deux ans.
Elle se demanda qu'est-ce que les mayas avaient bien pu fumer pour imaginer un truc pareil. Dans tous les cas, ce devait être fort, se dit-elle avec un air intéressé.
Mais elle chassa vite cette idée de son esprit. Elle avait des choses plus importantes auxquelles réfléchir. Même si elle ne savait pas ce que c'était. Elle regarda son reflet dans le miroir, intriguée : elle pensait à des choses étranges, aujourd'hui. Enfin bon.
Elle se leva, et rangea le cahier ouvert devant elle. Comme d'habitude, elle n'avait pas prêté la moindre attention au cours qu'elle était censée réviser. De toute façon, elle n'était plus à une mauvaise note près.
Elle sortit dans la rue, le cahier à la main, sans même un manteau. Elle ne s'en rendit compte qu'après avoir traversé la route. Elle se sentait étrangement ailleurs. Elle ne savait même pas pourquoi elle était sortie.
Elle retourna chez elle, avec l'impression d'avoir les jambes en coton. Sa tête tournait. Elle se demanda si elle ne couvait pas quelque chose.
Quand elle eut franchi le seuil de la porte, elle fut prise d'un vertige. Quand elle rouvrit les yeux, elle ne reconnut pas la pièce pourtant familière. Elle jeta un regard paniqué aux alentours. Elle avait l'impression d'avoir trop d'air dans les poumons pour pouvoir respirer. La faible lumière qui filtrait au travers des rideaux l'aveuglait. Elle se sentit tomber, tomber, tomber, comme dans un puis sans fond, alors même que le sol était toujours dur, sous ses pieds. Elle ne savait plus qui elle était, elle ne savait plus rien. Ses pensées n'étaient plus que des successions abstraites de couleurs et de formes, parfois juste étranges, parfois effrayantes.
Elle tomba à genoux. Le monde tournait autour d'elle. A ses oreilles provenait un son inconnu, comme un sinistre ricanement. Elle tenta de crier, mais aucun son ne sortit de sa gorge.
Puis elle s'évanouit, et fit un rêve étrange où la Terre explosait.



Un peu tendue, elle sonna à la porte...
C'était la première fois qu'elle faisait du baby-sitting, et elle ne savait pas trop a quoi s'attendre. Mais elle devait économiser, si elle voulait pouvoir d'offrir ce voyage aux Etats-Unis dont elle rêvait depuis des mois.
On lui ouvrit. C'était une jeune femme très brune, aux longs cheveux relevés en chignon, dotée de traits fins et avenants. Elle portait une élégante robe noire. Ses yeux étaient très sombres, et ses lèvres maquillées de rouges étirées en un sourire chaleureux.

"-Bonjour, et merci d'être venue aussi vite ! Viens, entre - je peux te tutoyer ? - Je vais te montrer la maison."

Intimidée, elle suivit la jeune femme, qui reprit sa tirade :

"Oh, au fait, je ne me suis pas présentée. Je m'appelle Lucy. Lucy... Durand. Mais tu peux m'appeler Lucy, évidemment. Viens, suis-moi. Donc, ici, tu as la cuisine. Sers-toi si tu as faim, n'hésites pas. Le repas de la petite est dans le micro-onde, tu n'as plus qu'à le faire réchauffer."

L'air pressé, elle ouvrit une porte.

"Le salon. Allume la télé si tu veux."

Elle continua, ses talons claquant d'un éclat froid sur le carrelage du couloir.

"La chambre de la petite. Elle s'appelle... Emma, et a quatre ans."

Elle sortit en silence pour ne pas la reveiller, continua le long corridor et pénetra dans une autre pièce.

"La salle de bain. Tu pourras la laver ? Il y a tout ce qu'il faut là."

Elle désigna d'un doigt à l'ongle soigneusement manucuré, verni de rouge, une étagère. Puis elle jeta un oeil à sa montre et eut un instant l'air paniqué de celle qui a peur d'arriver en retard.

"Bon, je dois filer. Tu as d'autres questions ? Tu te débrouilleras ? Je serais de retour avant une heure du matin. Merci encore !"

Et elle partit, sans même attendre de réponse. Le tout avait duré moins de cinq minutes.
Elle n'avait pas su où donner de la tête durant la visite éclair, et maintenant, pour ordonner ses pensées, elle établit une liste de priorités : tout d'abord, attendre que la petite se réveille, elle pouvait difficilement faire autre chose.
Timidement, elle entra dans le salon, intimidée par la maison inconnue. Elle alluma la télé.
Elle se rendit compte que le programme était dans une langue étrangère, qu'elle n'avait jamais entendue. Elle se dit que Lucy devait avoir des origines étrangères.
Le programme semblait être un reportage sur un meurtre. Ou une sorte de sacrifice, plutôt. Il y avait beaucoup de sang, et des personnes vêtues d'étrange façon. Une secte ?
Effrayée, elle éteignit la télévision, et retourna dans la cuisine. Là, elle s'assit sur une chaise, et sortit le livre qu'elle avait apporté.
Au bout d'une demie-heure environ, elle entendit qu'on bougeait dans la chambre de la petite.
Elle se leva, et ouvrit la porte délicatement. Elle regarda en direction du lit, sourit à l'enfant... qui n'y était pas.
Son coeur se mit à battre plus fort, et elle était en train d'imaginer des scenarii horribles, finissant tous par la mort d'Emma et son emprisonnement à vie, quand soudain elle entendit un grand "Bouh !" derrière elle. Elle fit un bond, et, se retournant, elle vit une petite fille aux cheveux noirs comme la nuit, toute de rouge vêtue, et avec les yeux impénétrables de sa mère.
Elle eut un rire crispé, et s'agenouilla en face de la petite fille.

"-Bonjour Emma, tu as bien dormi ?"

La petite ne répondit pas.

"-Tu as peur de moi ? Il ne faut pas être timide, je ne vais pas te manger.", Bredouilla-t-elle maladroitement.

La fillette, toujours sans un mot, la prit gravement par la main, et la tira jusqu'à la cuisine.

"-Tu as faim ? "

La jeune fille ouvrit la porte du micro-ondes, et en inspecta le contenu. De la viande. Crue.
Elle se demanda si la mère ne s'était pas trompée.
Elle ouvrit la porte du frigo et ne put retenir un mouvement de recul. Le frigo était remplis de viande crue. Nulle trace d'autre chose.
Elle se refusa d'en donner à la petite, et commença à se poser des questions sur la nature de cette famille.

"-Bon, on va prendre un bain, d'accord ?
-J'ai faim.
-Tu pourras manger quand ta mère sera rentrée.
-J'ai faim !
-Oui, d'accord."

Elle prit la petite par la main, et l'amena dans la salle de bain. Elle ouvrit le robinet d'eau chaude de la baignoire.

"-J'ai faim.
-Je sais.
-J'ai FAIM !"

La jeune fille commençait à s'enerver, quand elle laissa échapper un cri d'horreur : ce n'était pas de l'eau qui coulait du obinet, mais du sang !

"-J'AI FAIM !!!!!"

Et la petite se jeta sur elle, et la mordit au mollet. Puis elle planta ses ongles - non, ses griffes - dans sa peau, et grimpa jusque sur ses épaules. Là, elle la mordit - fort- dans le cou.

***
La mère, en rentrant, avisa sa fille.
"-Le repas était bon ? Tu as bien mis les restes au frigo ?"



Songeur, son regard était fixé dans le vide. Il sortit sa lame du fourreau, et en testa le fil du pouce. Une goutte de sang perla, et raisonna longuement dans le hangar vide en tombant.
Il se leva lentement. Il avait du travail, ce soir. Il ne pensait pas à cela avec une joie sordide, juste avec le sentiment d'un devoir à accomplir.
L'air était froid, mais s'il tremblait, c'était de détermination.
Il se mit en route, toujours sans se presser. Comme toujours, on ne lui avait donné qu'une adresse. Il ne repassa pas dans sa tête l'itinéraire, qu'il connaissait déjà par coeur.
Il ouvrit la porte du hangar, et sortit dans la ruelle déserte. Pas un endroit très fréquentable, mais il ne s'en souciait guerre. Lui même n'était pas très fréquentable non plus, de toute façon.
Il prit un chemin parallèle, veillant toujours à rester dans l'ombre.
Il tourna deux fois à droite, puis une fois à gauche. Enfin, il arriva devant une avenue plus fréquentée, éclairée par des réverbères.
Voila qui devenait interessant, constata-t-il froidement.
Il repéra l'appartement. Un balcon. Parfait.
Il patienta dans la venelle où il se trouvait jusqu'à ce que la rue de sa cible soit déserte. Il jeta un oeil à sa montre : trois heures du matin. Il était dans les temps.
L'appartement était au premier étage, et la façade usée par le temps et les intempéries rendait les prises nombreuses et l'escalade facile.
Il grimpa et se hissa sur le balcon à la force des bras, puis crocheta rapidement la serrure, et entra.
Pas de lumière, pas de bruit : sa cible dormait. Tout se déroulait sans accroc. Il se permit une moue de contentement.
Il se remémora les indications qu'on lui avait donné; dernière porte au fond du couloir.
Il graissa les gonds pour s'assurer qu'ils ne grincent pas, puis il ouvrit la porte délicatement.
Il regarda en direction du lit : une respiration régulière soulevait les draps.
Une femme, le visage caché par ses cheveux. Elle était seule. Parfait.
Il s'approcha à pas de loup, prit l'oreiller à côté d'elle, lui plaqua sur le visage, et, sans un même mouvement, lui trancha la gorge du geste assuré que confère l'expérience.
Puis, comme toujours, il alluma la lumière pour regarder le visage de sa cible.
Et quand il la reconnut, son poignard fit une toute dernière victime.





La plume glissait sur le papier, lentement, avec application. Parfois, elle s'arrêtait, hésitait, reprenait sa route, avec regret presque. On l'aurait étrangement qualifiée de mélodieuse, tant on aurait dit qu'elle dansait, dans un mystérieux ballet qu'elle seule pouvait comprendre.
Le papier était un peu jauni, plié par le poids des année. Il était entouré d'un halo de poussière qui dansait elle aussi, de manière envoutante, presque hypnotique.
La main était sèche, rugueuse. Elle avait vécu tant d'expériences qu'elle en semblait fatiguée.. Elle tremblait un peu. Ses ongles étaient courts, sa paume calleuse. Cette main avait certainement des centaines d'histoires à conter, encore. Peut-être était-ce ce qu'elle était en train de faire, à sa manière fragile, usée par le temps.
La pièce semblait un petit grenier, vide et poussiéreux. La lumière s'y déversait par une lucarne; les rayons du soleil éclairant le bureau en bois qui, avec sa chaise, seul meublait le lieu. Le vieil homme y noircissait le papier ancien d'encre.
Il parvenait au bas de la page. Il leva la plume, semblant perdu dans ses pensées. Une larme tomba sur la page, y formant une tache plus sombre.
Un soupir se fit entendre. Plus doucement encore, la plume traça un ultime mot au bas de la page, comme une signature.
Adieu.